Leur futur est-il compromis?

B.Fonctionnement chimique des antibiotiques

I) Le mode d'action des antibiotiques:

Contrairement à ce que l'on peut penser l'antibiotique n'est pas une "bombe",il ne détruit pas tout sur son passage. L'antibiotique a un mode d'action ciblé et précis. Les antibiotiques agissent généralement sur un des éléments de la structure bactérienne. Les principaux modes d'action sont rassemblés ci dessous (avec également quelques structures chimiques d'antibiotiques).Certains empêchent la formation de leurs enveloppes protectrices (membrane et paroi). D’autres substances agissent en bloquant certaines réactions chimiques indispensables à leur métabolisme. Enfin, certains antibiotiques empêchent la traduction de leur information génétique (leurs gènes) en protéines.

1.Destruction de la paroi bactérienne :

L'antibiotique bloque la synthèse de la paroi par inhibition de la transpeptidase ce qui inhibe la synthèse du peptidoglycane (le peptidoglycane forme autour de la cellule un filet à mailles plus ou moins serrées qui entoure la bactérie à la manière d'un sac. Ce réseau est composé de chaînes de glycanes reliées entre elles par des chaînons peptidiques). En d'autres termes la bactérie ne peut plus former sa paroi externe, la bactérie est alors désorganisé .Cela empêche la formation de nouvelles bactéries et peut entraîner la destruction de celles déjà existantes. Les ß-lactames (famille à laquelle appartient la pénicilline) agissent suivant ce mode d'action. Ces antibiotiques interférant avec la biosynthèse du peptidoglycane n'auront aucune action sur les bactéries naturellement dépourvues de paroi, sur les protoplastes, les sphéroplastes et les formes L.

Bactérie Deinococcus (composé d'une paroi)

Voici une vidéo (en deux parties) qui illustre ce phénomene (en anglais):

 https://www.youtube.com/watch?v=4uliYqX4j6M https://www.youtube.com/watch?v=-sct8GUye-0&feature=related

2.Action sur la membrane cellulaire :

L'antibiotique a des propriétés de surfactant qui lui permettent de s'insérer parmi les phospholipides de la membrane externe. Un surfactant est une molécule amphiphile, c'est à dire qui présente une tête polaire qui a des affinités pour l'eau et une queue apolaire qui a des affinités pour les substances apolaires comme l'huile(voir schéma). Une telle molécule permet de diminuer la tension de surface entre deux phases,normalement sa tension de surface est nulle ce qui lui confère une stabilité au contraire des bulles très instable (elle éclate rapidement!). Cela perturbe la perméabilité membranaire (augmentation anormale) et permet la diffusion de substances hydrosolubles hors de la bactérie, ce qui entraîne sa destruction.Les polymyxines (lipopeptides cycliques) agissent suivant ce mode d'action. Les polymyxines (comme le polymyxine B) sont constituées d’un polypeptide cyclique et d’un acide gras.Plus précisement, par leur extrémité hydrophobe (la "queue"), ces antibiotiques pénètrent à l’intérieur de la membrane et s’incorporent à la couche lipidique alors que l’extrémité hydrophile(la "tete") reste orientée vers l’extérieur. Il en résulte une désorganisation de la structure membranaire ce qui provoque la mort de la cellule.En raison de la similitude entre les membranes des cellules bactériennes et des cellules eucaryotes, les antibiotiques actifs sur la membrane sont toxiques et seul un nombre restreint de molécules a trouvé une utilisation thérapeutique.

Schéma en anglais de molécules dites amphiphiles

Interpretation du schéma: les phospholipides présentent aussi un pole hydrophobe (leur queue) et un pole hydrophile (leur tete).Les antibiotiques ayant des propriétés de surfactant imitent les phospholipides et se confondent avec ces derniers mais les nouveaux venus (les antibiotiques) modifent la tension de surface ,elle n'est plus nulle! (car ils ne sont pas pris en compte par la cellule procaryote).Il s'en suit comme expliqué ci-dessus la mort de la bactérie.

3.Action sur l'ADN :

L'antibiotique agit en se liant au complexe ADN-ADN gyrase bactérienne ce qui a pour effet d'inhiber la gyrase. Cet enzyme inhibe la réplication ou la transcription("lecture" du message de l'A.D.N par la bactérie) de l'A.D.N indispensable à la formation de nouvelles bactéries.La mitose ne peut se réaliser.Les fluoroquinolones agissent suivant ce mode d'action (énoxacine).


  

Modélisation d'une chromatine bactérienne

4.Action sur la synthèse protéique :
L'antibiotique interfère avec la synthèse protéique bactérienne en agissant sur les ribosomes.Les ribosomes sont des complexes constitués de proteines et d'acides nucléiques permettant la Traduction de l'A.R.N.m (arn-messager) en protéine. Cette fonction est commune à toutes les cellules vivantes. En effet, les ribosomes bactériens (constitués de deux sous-unité 30S et 50S formant un ribosome 70S) sont différents des ribosomes eucaryotes (constitués de deux sous-unités 40S et 60S formant un ribosome 80S) offrant la possibilité d'avoir des substances dont l'action est très spécifique. Les tétracyclines (auréomycine) et les macrolides (érythromycine) agissent suivant ce mode d'action. Les macrolides agissent au niveau de la sous-unité 50S, les tétracyclines agissent sur la sous-unité 30S.D'une manière générale ces antibiotiques ciblent les ribosomes spécifiques aux bactéries,empêchent ainsi la production de proteines qui est indispensable à la production de proteines vitales (ex:fabrication du "flagelle").  

 

Carte tridimensionnelle d’un ribosome bactérien bloqué, reconnu par le complexe de sauvetage ARNtm-SmpB. Le complexe ARNtm-SmpB est coloré en rouge, l’ARN de transfert bloqué en violet, la petite sous-unité ribosomique en jaune et la grande sous-unité en bleu. En arrière plan, une image de cryo-microscopie électronique à transmission permet de visualiser des ribosomes bactériens, mesurant en moyenne 25nm de diamètre chacun. © F. Weis, P. Bron, E. Giudice, J.-P. Rolland, D. Thomas, B. Felden, R. Gillet, EMBO Journal 2010 

 5.Antibiotiques agissant par inhibition compétitive:

L’acide tétrahydrofolique intervient dans de nombreuses voies métaboliques et notamment dans la synthèse des purines et des pyrimidines chez la bactérie.Sa synthèse se fait en trois étapes dont la première nécessite de l’acide para-aminobenzoïque ou PAB. La synthèse de l’acide tétrahydrofolique est inhibée par les sulfamides, le triméthoprime et l’acide para-aminosalicylique.

La bactérie va insérer l'antibiotique inhibiteur dans son métabolisme mais les légères différences de structure entre l'antibiotique et le précurseur vont entraîner le blocage des voies métaboliques. La cellule ne peut plus synthétiser les acides nucléiques. Les sulfamides agissent suivant ce mode d'action en entrant en compétition avec le PAB, inhibant la dihydrosynthétase et de ce fait la synthèse d'acide folique qui assure la croissance de la bactérie.L'acide folique est une vitamine intervenant dans la fabrication de l’ADN, dès qu’une cellule de l’organisme nécessite un renouvellement rapide(ici la bactérie).

 

entrant en compétition: C'est à dire que les sulfamides prennent la "place" du PAB dans le site actif de l'enzyme (la dihydrosynthétase) et ainsi inhibe son métabolisme.

Vitamines: substances indispensables à la vie en très petites quantités, mais que l’organisme ne peut produire lui-même.

Formules chimiques de ces différents types d'antibiotique:

 

Les antibiotiques agissant sur la paroi bactérienne:

 

 

 

 

Antibiotiques agissant sur l'A.D.N bactérien et par inhibition compétitive:       

 

    

    

Antibiotiques agissant sur la synthèse des protéines bactériennes:

 

 

  

 Antibiotiques agissant sur la membrane bactérienne:

    

 II)L'intensité antibactérienne des antibiotiques:

 Selon leur nature et leur concentration, les antibiotiques agissent selon deux modalités différentes, la bactériostase et la bactéricidie.(vu precedement partie A)

La bactériostase se définit comme une atteinte de la croissance bactérienne telle que le nombre de bactéries formées est inférieur à celui de la croissance sans antibiotique mais supérieur ou égal au nombre de bactéries ensemencées. L’effet bactériostatique résulte soit d’une diminution du nombre de divisions des bactéries sans altération de leur vitalité soit d’un équilibre entre la croissance et la mort des bactéries (plus de morts que de naissance (c'est une image)).

La bactéricidie est une destruction des bactéries sous l’effet de l’antibiotique. Les bactéries demeurées vivantes où on observe une bactéricidie partielle, ne sont pas, pour la plupart, des bactéries résistantes, ce sont des bactéries qui ont échappé provisoirement à l’action de l’antibiotique par le simple fait du hasard. Ces bactéries sont appelées des survivantes et, repiquées sur un milieu sans antibiotique, elles donnent naissance à une population identique à la population initiale(aucune bactérie n'est donc résistante). Cet effet bactéricide augmente plus ou moins rapidement en fonction de la concentration en antibiotique et en fonction du temps de contact. En utilisant des doses très élevées, pratiquement tout antibiotique peut être bactéricide.

Utilisation en médecine: Le plus souvent, un simple effet bactériostatique est suffisant en thérapeutique. En limitant la prolifération bactérienne, l’antibiotique permet aux défenses de l’organisme d’intervenir sans être dépassées. Par contre, lors d’infections sévères (septicémies) ou lors d’infections chroniques ou lors d’infections survenant sur des terrains fragilisés, un effet bactéricide est souhaitable.

IV) La découverte de nouvelles molécules antibiotiques est de plus en plus rare

 

En effet ces derniers années le nombre de nouveaux antibiotiques ne cessent de diminuer.Faut à quoi ou à qui ?

Les antibiotiques sont les pires produits pharmaceutiques qui soient : ils guérissent la maladie ! (à prendre au 2°) Dès lors, les laboratoires préfèrent financer la recherche sur les traitements des maladies chroniques, pour lesquelles les patients sont contraints de prendre leur traitement pendant des années, voire toute leur vie, et non pas seulement pendant une ou deux semaines. Il faut en effet 800 millions de dollars et dix à quinze ans de recherches pour mettre sur le marché un nouveaux antibiotique et sa rentabilité n’est possible que sur la durée.

Ces éléments ont abouti à «une baisse de 56 % en vingt ans du nombre d'antibiotiques autorisés chaque année aux États-Unis par la Food and Drug Administration (FDA)», conclut un article de essentialdrug.org. Selon une étude publiée au mois de mai 2004, sur les 506 médicaments arrivés aux dernières étapes des essais cliniques chez les quinze premiers laboratoires mondiaux, six seulement sont de nouveaux antibactériens! (soit des antibiotiques).Une raison économique est donc à l'origine de cette baisse de nouvelles molécules antibiotiques sur le marché, nous avons donc les moyens de découvrir de nouveaux antibiotiques (comme les tétracyclines,enoxacine,polymixine....)mais le profit règne ,en ont décidé ainsi les industrielles.

 

Mais il existe également une raison "naturel",la résistance des bactéries de plus en plus présente qui rend inapte de nombreuses molécules d'antibiotiques, les rendant "bon à rien" rapidement...La partie suivante C developpera cet aspect.

 

Source:

 

https://culturesciences.chimie.ens.fr/dossiers-chimie-histoire-article-Penicilline_Decouverte_Antibiotique_Demirdjian.html#d0e164

https://www.eurekasante.fr/medicaments/antibiotiques/mecanisme-action.html

https://www.bacteriologie.net/generale/sitesactionsantibiotiques.html

https://news.suite101.fr/article.cfm/bacteries--la-grande-misere-des-antibiotiques-a17993

https://books.google.fr/books?id=S00Gyo1vDr4C&pg=PA251&lpg=PA251&dq=PAB+antibiotiques&source=bl&ots=2kx5xRCj1e&sig=Ecz50vOiwcAR4r1q6SsiQY-gkQg&hl=fr&ei=3UjdTJ7eE8-JhQeR2-TDDQ&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=3&ved=0CCgQ6AEwAg#v=onepage&q=PAB%20antibiotiques&f=false

https://www.google.fr/imgres?imgurl=https://www.ecosociosystemes.fr/cellbact.jpg&imgrefurl=https://www.ecosociosystemes.fr/cellule_bacterienne.html&usg=__umK8YqqeVh-v0w3bffSYoJuX92w=&h=432&w=576&sz=72&hl=fr&start=20&zoom=1&um=1&itbs=1 

https://www.cnrs.fr/insb/recherche/parutions/articles2010/r-gillet.htm 

https://www.vulgaris-medical.com/encyclopedie/acide-folique-118.html 

https://www.bacterio.cict.fr/bacdico/bacteriogene/structure.html#membrane

https://homepage.mac.com/ltbo/EvolVie/biocel/cellule1.htm

Http://www;planetegene.com

 

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